Marché et Etat sont-ils compatibles ? Vous appuierez votre démonstration sur des exemples précis.

Bonnes Copies

Bonne copie du lycée : 54 - Nancy - Lycée Henri Poincaré

Cette copie a été notée : 13 / 20

Commentaire du professeur : Les méthodes de la dissertation sont comprises mais il manque toutefois des exemples précis. Attention aux passages inutiles et aux fautes d’orthographe. Peut mieux faire.


Untitled Document En tant que lieu de rencontre de l’offre et de la demande, le marché semble être l’un des acteurs fondamentaux de la vie économique. Cependant, si l’Etat a un rôle qui dépasse le cadre économique, il s’inscrit bien comme un rival du marché. Aussi est-on en droit de s’interroger sur le degré de compatibilité qui existe entre marché et Etat. Dans quelle mesure Etat et marché peuvent-ils coexister ? Depuis la naissance du capitalisme et celle du socialisme, nombre de théories ont été émises à ce sujet, laissant la part belle tantôt à l’Etat, tantôt au marché. Si de tels rapports de domination ont existé, il importe de montrer jusqu’où ils restent fondés et dons quelles en sont les limites.

Dans un premier temps, il convient d’étudier les relations qui ont fait l’objet de différentes théories entre marché et Etat. Au cours du XVIII° siècle, le marché s’est imposé, comme le montre les libéraux. Mettant en avant l’importance, voire la toute puissance, des lois naturelles, ils ont montré que la main invisible du marché suffisait à tout ordonner et que l’économie, dans ces conditions, était régulée en permanence, n’offrant pas à l’Etat le loisir d’intervenir. Il faut bien comprendre que dans l’esprit des théoriciens libéraux, l’Etat ne pouvait qu’avoir un rôle perturbateur et générateur de troubles. Ainsi son rôle se réduit-il à jouer le gendarme : il doit s’assurer qu’aucune entrave n’est faite aux libertés individuelles. Le " laisser-faire, laisser passer " ouvre alors les portes à l’impérialisme du marché. Consommateurs et producteurs régissent toute l’activité économique qui repose sur l’échange. Ainsi se pose-t-on la question de savoir si l’homme se réduit au simple " homo oeconomicus " de Wilfrid Pareto. Il est frai que le rôle du marché fait de l’homme un être qui existe pour ce qu’il peut acheter, ou ce qu’il peut produire et vendre : sa force de travail. Il suit en effet les lois du marché, qui consistent à être en concurrence avec ses semblables. Tout comme l’entreprise, il est un acteur de l’économie de marché. Cette dernière est mue par le profit. Elle doit donc être puissante pour régner sur le marché. De tels objectifs poussent à la concentration, mais aussi à l’innovation puisqu’il faut devancer ses adversaires, s’emparer du marché avant eux. Ainsi se met en place un cercle vertueux du progrès qui doit tout au marché et non à l’Etat puisque celui-ci s’est constitué " agent de sécurité " du marché.
L’écrasante supériorité du marché est l’une des caractéristiques majeures de l’économie américaine. Ceux-ci ont mis en application ces théories, ou plus exactement le système anglo-saxon qui en découle et ils se trouvent aujourd’hui à un stade avancé, puisque oligopolistique, du capitalisme. La concentration d’entreprises permet ainsi aux américains d’être parmi les plus grandes firmes mondiales, et, pour n’en citer qu’un, Microsoft est l’un des meilleurs représentants de cette tendance au monopole… Monopole qui remet en question le concept même de marché puisque la concurrence n’est plus assurée. Une nouvelle question se pose alors : Que doit fair l’Etat ? D’autre part, les investissements et les innovations sont tels que les FMN américaines sont à la pointe de la modernisation et du progrès technique, ce qui leur permet de s’imposer sans difficulté sur le marché mondial. Il semble donc que l’ère du marché soit solidement enracinée et ne donne qu’un rôle médiocre à l’Etat.
Pourtant, il convient de nuancer ce point. Si le marché tend à éclipser l’Etat, il n’en n’ a pas toujours été ainsi. D’ailleurs cette incompatibilité apparente pourrait bien être renversée. Marx a en effet montré que le capitalisme courait à sa perte. La philosophie que ce dernier a engendrée, le libéralisme et la course au profit mèneraient en réalité le capitalisme à une fin proche. Comment, dés lors, concevoir un système ou ne règnerait que le tout puissant marché ? Le moteur de cet échec est au cœur du marché : la concurrence engendre la nécessité de modernisation, seul moyen de rester concurrentiel, qui suscite elle-même des investissements. Mais pour Marx, la plus value qui est réalisée aux dépens des travailleurs ne suffira pas à combler ces investissements ; d’où le dépérissement d’un système où le marché régnait en maître. Le marxisme-léninisme, qui s’inscrit dans la lignée du marxisme, va finalement imposer la dictature du prolétariat qui marque le début du règne de l’Etat, en URSS. La collectivisation, suivie de la planification met fin à toute concurrence. Il n’existe plus aucune relation entre les entreprises.
La planification en URSS est telle que tout est prévu sans intervention du marché. On ne tient pas compte de l’offre ni de la demande. C’est l’Etat qui fixe les quantités devant être produites par l’intermédiaire du Gosplan. Il semble qu’un tel système puisse faire face aux crises qui secouent les Etats-Unis et autres pays européens dans les années 30. En effet, Marx envisageait toue crise du capitalisme comme une crise de surproduction. Donc, si l’Etat fixe les quantités à produire et le domaine de ces productions, rien ne peut fluctuer. Dans cette perspective, seule l’Etat est tout puissant, niant l’efficacité du marché.
Au final, la domination toute puissante de l’Etat ou du marché tendrait donc à prouver que l’existence de l’un conduit à la suppression de l’autre. Cela montrerait alors une incompatibilité de l’Etat et du marché. Néanmoins, il semble qu’une telle domination se traduise différemment et qu’elle engendre certaines lacunes, voire certains dysfonctionnements.

On a vu précédemment que la planification ne tenait pas compte du marché. Une entreprise a alors pour objectif de remplir le contrat fixé par l’Etat, sans se préoccuper du reste. N’étant pas poussée à la concurrence, elle n’innove pas, n’investit pas, n’améliore pas ses techniques de production. Il n’existe aucune motivation réelle des travailleurs, qui sont réduits à épargner l’argent qu’ils gagnent à défaut de le dépenser dans des produits de consommation, déclarés trop bourgeois et par la même, contraire à la doctrine soviétique. Un tel système peut donc fonctionner à l’intérieur du pays mais il ne peut survivre au plan international. Comment lutter face à des entreprises, qui, motivées par la loi du marché, se sont modernisées, ont élevé leurs taux de productivité et ont abaissé leurs coûts de production ? C’est le problème qui s’est posé au lendemain de la réunification en Allemagne. L’ex-RDA ne pouvait survivre économiquement face à l’économie de marché mise en place en RFA. Il est ainsi clair que le marché tout puissant devrait de débarrasser de l’impérialisme étatique.
Autre problème soulevé par le rôle trop puissant de l’Etat en URSS : le mythe de l’industrie. L’Etat voyait dans l’industrie une fin tant économique que commerciale : c’est là que devait se forger tout honnête communiste. Cependant, à trop vouloir imposer le modèle industriel comme celui de la réussite économique, l’Etat a oublié que le marché existe en dehors du secteur industriel. Les autorités soviétiques ont ainsi imposé, à tort, l’industrialisation de certains pays du tiers-monde, fraîchement décolonisés et et tout aussi rapidement passés sous la tutelle de l’URSS. Le résultat fut catastrophique, ces pays n’étant pas du tout prêt à faire une telle mutation du point de vue économique.
On voit alors que l’Etat ne peut agir impunément et sans prendre garde au marché qui régit lui aussi une partie de l’économie. Il en va de même quant à l’impérialisme du marché qui se veut détenteur de toutes les ficelles de l’économie. Le libéralisme ne peut en effet s’imposer à toute l’économie ni à l’ensemble de la société. Il apparaît clairement que les lois naturelles qui devaient régir l’économie n’ont pas été aussi efficaces qu’elles le laissaient prévoir. D’une part les inégalités sociales se sont considérablement développées, d’autre part, et surtout, le marché n’a pas accompli son rôle régulateur. Ainsi, à la place d’une concurrence juste et parfaite se sont progressivement mis en place des oligopoles qui deviennent les maîtres du marché. Divers organismes génétiquement modifiés (OGM) sont ainsi proposés puis imposés aux agriculteurs et aux consommateurs américains.
Etat ou marché ne peuvent donc pas s’imposer comme unique acteur de l’activité économique. Ils ont leurs failles et leurs faiblesses, comme peut le montrer la crise de l’ultra libéralisme ayant succédé à la politique de Mme Thatcher en Angleterre. Il serait alors intéressant de voir jusqu’où s’étend le rôle de l’Etat, et réciproquement celui du marché et d’en déterminer les limites respectives.

Revenons-en aux premières conséquences et aux problèmes ayant trait à la planification en URSS. L’Etat se veut si puissant qu’il a imposé un réseau pyramidal visant à centraliser toutes les données de l’administration. La communication est de ce fait très hiérarchisée : On ne peut en référer qu’au supérieur hiérarchique et ainsi de suite. Cela signifie bien qu’il ne peut y avoir de communication directe entre les entreprises. Cela provoque d’énormes problèmes structuraux. Si l’on considère une entreprise automobile, celle-ci se voit imposer par le Gosplan la production d’un nombre déterminé de voitures. Il peut arriver pour des raisons ou d’autres qu’elle n’atteigne pas ce chiffre. L’entreprise se chargeant de la Production de tôle aura donc produit plus de tôles que nécessaire. Il y aura donc surproduction et problèmes d’évacuation des stocks ainsi constitués. Le problème est identique dans l’autre sens : si une entreprise d’acier n’atteint pas le nombre prévu de tonnes d’acier, cela se répercute sur toutes les fabriques qui la suivent. Au final, il y a donc un problème de chaîne engendré par la centralisation excessive de l’Etat. Cet exemple simple montre l’importance du marché au sein au sein duquel s’effectue l’offre et la demande. Chaque entreprise peut alors être en relation avec une autre et gérer sa production en fonction du marché. La Chine actuelle a ainsi mis fin aux communes populaires mises en place sous Mao pour évoluer vers un socialisme de marché qui est parfaitement intégré au marché mondial au point de vue économique.
Le retournement de situation ayant eu lieu en chine peut-être comparé aux crises du capitalisme qui ont vu s’imposer avec encore plus de vigueur le " socialisme démocratique " et qui ont vu grandir le rôle de l’Etat face au marché. Avant tout il est utile de rappeler que le marché est sujet à des mouvements cycliques qui montrent tantôt des phases de croissance positives, tantôt des phases de croissance négatives, pour ne pas dire de récession. Il faut s’en remettre pour cela aux économistes tels que Kondratiev ou Schumpeter. Devant la régularité (certes discutée) ou la logique de ces cycles, on est alors en droit de se poser la question suivante : que fait l’Etat pour enrayer la crise fatale qui va suivre ? Il semble bien que cette logique des cycles soit absurde, aucun Etat n’ayant encore réussi à affronter ces crises. Ces dernières influent néanmoins sur la politique économique. En effet, après la grande crise asiatique, le rôle de l’Etat au Japon s’est profondément durci, sauvant les entreprises endettées grâce à une grande vague de nationalisations et donnant le beau rôle au MITI, charger de donner les directives de productions nationales.
Il semble donc que l’Etat et le marché deviennent de plus en lus complémentaires. Ainsi l’Etat comble-t-il les lacunes du marché. On parle alors de l’Etat providence, qui tente de remédier aux inégalités engendrées par un libéralisme outrancier. Il prend des mesures sociales, intervient à propos des retraites et peut fixer un salaire minimum, comme le RMI en France. A cela s’ajoute l’Etat planificateur, qui prévoit et conseille les objectifs à atteindre sur une période de 4 à 5 ans. Enfin on parle véritablement d’Etat acteur quand celui-ci intervient sur le marché en le nationalisant ou en le privatisant. Ainsi l’Allemagne qui a mis très tôt en application le modèle rhénan a-t-elle réussi à jouer sur tous les tableaux du marché et de l’Etat. Bismarck avait en effet entrepris de doter son pays de certaines mesures sociales tandis que la stabilité du marché est aujourd’hui assurée par une grande stabilité financière. Comme dans d’autres pays les syndicats sont un moyen de privilégier la communication entre salariés et patrons et donc de permettre un bon fonctionnement de l’entreprise ?
Enfin, il faut remarquer que les modalités d’intervention de l’Etat dépendent de la tradition observée dans les différents pays. Ainsi l’Etat a-t-il toujours eu une place privilégiée en France, impulsé au départ par le mercantilisme. On retrouve cette permanence de nos jours avec une politique de privatisation qui est assurée avec la conservation de " noyaux durs ". Cela permet à l’Etat de rester propriétaire de certaines actions de l’entreprise par l’intermédiaire de groupes nationalisés.

Il semble donc qu’Etat et marché se complètent. Tous deux sont nécessaires à la vie économique. La co-existence et la compatibilité de l’un avec l’autre est assurée par les différents rôles qui leur sont attachés. On retiendra finalement que s’ils sont incompatibles dans leurs extrêmes (une présence trop forte de l’Etat nuit au marché et inversement) on peut adapter leur rôle pour gérer au mieux l’économie et les sociétés qui en dépendent.