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Les politiques monétaires et budgétaires sont
les instruments conjoncturels des Etats pour tendre vers le "carré
magique" de Kaldor, qui prône une faible inflation, l’équilibre
extérieur, la croissance et l’emploi. En effet, la politique monétaire
vise à contrôler par la masse monétaire, l’inflation ayant
en corrélation un impact sur le taux de change et la compétitivité
influençant donc l’équilibre extérieur. De même, la
politique budgétaire, qui a été fortement utilisée
lors des Trente Glorieuses sous l’influence des idées keynésiennes,
s’applique à faire varier les soldes budgétaires relançant
ou refroidissant l’économie influençant donc la croissance d’où
l’emploi. Ces instruments représentent donc les armes de politiques nationales
pour atteindre des objectifs finaux de bonne santé des grands fondamentaux
de l’économie.
Pourtant, de par la mondialisation et la régionalisation, qui prévaut
parmi les pays développés, ces instruments semblent remis en question
au niveau national.
Quelle a été l’évolution des politiques monétaires
et budgétaires entre-elles dans les pays développés depuis
le second choc pétrolier face à l’internationalisation des économies
?
Nous examinerons tout d’abord l’évolution de la policy mix jusqu’en 1988
date clé pour l’Europe et les USA. Puis nous nous intéresserons
à la dimension internationale à laquelle sont confrontées
ces politiques conjoncturelles.
La fin des années 1970 marque sensiblement la fin de
la primauté des politiques budgétaires sur les politiques monétaires.
En effet, durant la période de forte croissance d’après guerre,
la politique monétaire est peu utilisée ce qui caractérise
par une montée de l’inflation accompagnant la bonne santé économique
assurée par les politiques budgétaires de type keynésien
et remise en cause lors des deux chocs pétroliers. De plus, l’analyse
de la courbe de Phillips met en avant l’idée qu’une forte inflation est
nécessaire pour garantir l’emploi et inversement, si bien que la politique
monétaire est délaissée face à des politiques budgétaires
expansives avec des déficits publics volontaires. Les deux chocs pétroliers
vont remettre en cause cette corrélation entre inflation et emploi puisque
forte inflation coexiste avec chômage, les politiques budgétaires
de stop-and-go de type keynésien semblent inefficaces face à cette
crise si bien que la fin des années 1970 marquent la fin de ce type de
politiques budgétaires. Ainsi les plans Barre en 1978, Mauroy en 1981
seront les dernières tentatives de politiques budgétaires keynésiennes
alors que la politique monétaire semble redevenir un instrument à
part entière. Les politiques de désinflation compétitive
et de franc fort marque le retour à une politique monétaire active.
De plus, en ce qui concerne l’Europe la création du SME oblige les pays
membres à avoir des politiques monétaires actives et restrictives
pour rester fixée aux cours pivots dans la marge de plus ou moins 2.25%
étant donné que le SMI a éclaté en 1971 et le serpent
monétaire en 1973. D’une part, la politique budgétaire est dès
lors soumise aux idées libérales et néo-classiques ce qui
implique le retour à l’équilibre budgétaire, la fin des
déficits publiques, qui marquaient une présence trop prononcée
de l’Etat dans l’économie. En effet, pour ce courant d’idée, les
déficits publics ne sont pas sains et provoquent de l’inflation non désirées.
Aussi la politique budgétaire est-elle fortement réduite, à
la fin des années 1970, puisque poussée vers l’équilibre
budgétaire; D’autre part, la politique monétaire est soumise aussi
à des idées plus libérales que sont les thèses monétaristes
de M. Friedman, qui appelle à une politique monétaire plus axée
sur le marché. En outre, il existe plusieurs façon de contrôler
la masse monétaire en circulation : par la fixation du taux de réescompte
qui pousse les banques ou non à offrir des liquidités aux agents,
l’encadrement du crédit qui limite les offres de prêts et enfin
les réserves obligatoires et la fixation du taux de réescompte
variable et le taux directeur calculé par la Banque Centrale. La politique
monétaire se dirige à la fin des années 1970 vers un abandon
progressif pour l’encadrement du crédit trop rigide face aux besoins
de gains de parts de marché des banques et vers la mise en place d’une
régulation plus par le marché avec des taux de réescompte
variable selon l’offre et la demande et avec un taux plancher et plafond et
qui joue également sur le taux de réserve obligatoire et la politique
d’open-market. La politique monétaire se modernise donc et retrouve une
place accrue dans la policy mix des années 1970 à l’heure où
la régionalisation s’accélère et prend des dimensions nouvelles.
Le milieu des années 1980 va marquer l’évolution
des politiques monétaires et budgétaires des pays de l’OCDE. Tout
d’abord, la primauté de la politique monétaire se confirme. Ainsi,
les USA vont appliquer, sous l’impulsion du président de la FED, une
politique monétaire restrictive alors que la politique budgétaire
semble beaucoup moins active en subissant les déficits par les dettes
et les déséquilibres extérieurs. Par ailleurs la dimension
monétaire européenne connaît un nouvel élan puisque
l’Acte Unique européen est signé en 1985/1987 et mis en application
en 1993. Ce traité est révélateur de la dimension supranationale
que prend la politique monétaire et de facto la politique budgétaire.
En effet, cet acte prévoit la création en plusieurs phases de
l’Union Economique et Monétaire (UEM), il prévoit la libéralisation
des échanges, la liberté des flux de capitaux, la création
d’une autorité politique européenne (Commission Européenne,
Conseil Européen), et la Banque Centrale Européenne (BCE) : l’autorité
monétaire. En effet, la Commission Européenne est chargée
du budget européen même si reste encore limité (aujourd’hui
1.27% du PIB européen) et la BCE est chargée de la politique monétaire
unique en fixant notamment le taux directeur (aujourd’hui 3.75%), contrôlant
l’approvisionnement de la masse monétaire et coordonnant ses objectifs
avec le SEBC (Système Européen des Banques Centrales). De plus
cet acte unique prévoit en dernier stade l’adoption de la monnaie unique
: l’euro. La dimension donnée aux politiques monétaires et budgétaires
est claire : les Etats ont donc optés pour la création d’une entité
budgétaire et monétaire à long terme unique. Les critères
de convergence sont au nombre de quatre et concernent notamment des indicateurs
tels que l’inflation, qui doit être inférieure à 1.5 points
des trois meilleurs scores de l’Union, la dette publique ne devant pas excéder
les 60% du PIB. Ceci met donc bien en relief l’idée que politiques monétaires
et budgétaires ont pris une dimension supranationale pour les pays de
l’UE, il ne s’agit plus d’un instrument conjoncturel national autonome mais
d’un instrument communautaire, qui soumet une nécessité de convergence
des politiques nationales. En fait, les pays communautaires ont fait le choix
de perdre leur autonomie pour répondre au "triangle d’incompatibilité"
de Mundell, qui met en relief l’idée que change fixe (avec le S.M.E.
puis l’euro depuis 1999), politique monétaire autonome et stabilité
du chaux de change sont incompatibles d’où la perte d’autonomie pour
la communauté qui doit faire face aux chocs asymétriques. Le cas
européen présente donc l’aspect de convergence des politiques
monétaires et budgétaires puisque ces instruments conjoncturels
sont sortis du cadre national. En effet, par exemple aujourd’hui un pays membre
ne peut se lancer dans une politique de relance de type keynésien sans
risquer de sortir des critères de convergence et sans être confronter
aux problèmes de fuites liées à l’ouverture qui annulent
l’effet multiplicateur. Aussi les politiques budgétaires keynésiennes
ne peuvent être utile qu’au plan européen pour éviter les
fuites, il y a donc régionalisation des politiques budgétaires
nationales. De même, pour la politique monétaire, aujourd’hui tous
les pays de l’UE sont soumis à la BCE, qui est indépendante à
l’instar de toutes les Banques Centrales nationales se libérant ainsi
des pressions politiques et répondant alors aux nécessités
réelles du marché. Donc les pays doivent se soumettre au taux
directeur européen, suivre la politique monétaire commune amplifiée
par la mise en place de l’euro. De même, la convergence européenne
a modifié l’environnement des politiques monétaires puisque les
marchés financiers se regroupent comme la place boursière de Paris
et de Bruxelles et sont tous passés à la cotation en euro.
La convergence des politiques monétaires et budgétaires dans le
cadre de l’Europe peut être généralisée à
la convergence entre les pays de l’OCDE due à la mondialisation et à
la globalisation financière. Ainsi deux pays de l’OCDE ne peuvent aller
à contre-courant l’un contre l’autre en ce qui concerne leur politique
budgétaire et monétaire. Par exemple, lorsque les USA ont remonté
leur taux directeur à 6.75%, l’Europe l’a fait passer de 3% à
3.75%, ainsi la convergence s’est développée à l’échelle
internationale. Il semble clair qu’un pays de l’OCDE ne peut se lancer seul
et à contre-courant dans une politique budgétaire expansive ou
dans une politique monétaire laxiste. Aujourd’hui, la politique monétaire
semble donc toujours primé sur la politique budgétaire même
si ces deux instruments sont voués à rester des politiques d’austérité
où pour l’Europe la voix allemande de stabilité et équilibre
semble être suivie. La marge de manoeuvre de telles politiques semblent
donc avoir été depuis les années 1970 de plus en plus limitée
à ceux de l’interdépendance économique.
Si la fin des années 1970 ont été marqué
par un revirement en faveur de la politique monétaire à l’encontre
de la politique budgétaire, ces deux instruments semblent être
sorti, depuis, de leurs cadres nationaux comme arme conjoncturelle des Etats
pour atteindre une dimension supranationale, européenne voire internationale
où la convergence nécessitée par une mondialisation accrue
paraît avoir limité celle-ci. Mais cette convergence stricte semble
par certain aspect (chômage prolongé et croissance molle) avoir
"sacrifié l’économie sur l’autel de la monnaie" que
des politiques expansives auraient peut-être pu contrecarrer. Une politique
budgétaire expansive à l’échelle européenne est-elle
la solution ?