Pourquoi des états ?

Bonnes Copies

Bonne copie du lycée Blaise Pascal de Clermont Ferrand. Cette copie a été noté 15/20. Voici le commentaire du professeur : Bon devoir. un effort de construction. Vous avez saisi la portée de la question.

Bonne copie du lycée : 63 - Clermont-Ferrand - XXXX

Cette copie a été notée : 15 / 20

Commentaire du professeur : Bon devoir. un effort de construction. Vous avez saisi la portée de la question.


Untitled Document Biologiquement, l’humanité est l’espèce de tous les individus ayant pour garniture chromosomique : 2n=46. L’humanité est donc un tout, une entité. Cette entité se caractérise notamment par le " sentiment d’humanité ". En effet chaque être humain ne peut qu’être affecté par le malheur accablant l’un de ses semblables par exemple, et si un tremblement de terre détruit des villes, tuant ainsi des milliers d’hommes, alors c’est toute l’humanité qui en est affectée, par un phénomène d’identification aux victimes. Aussi John Donne, un penseur anglais du XVII siècle a t-il écrit : " Nul homme n’est une isle complète en soy-mesme ; tout homme est un morceau du continent ; une part du tout… La mort de tout homme me diminue, parce que je suis solidaire au genre humain. Ainsi donc, n’envoie jamais demander : pour qui sonne le glas? Il sonne pour toi. ". Cependant l’on observe à travers l’histoire des hommes la formation d’Etats ; aussi l’on peut se demander pourquoi l’humanité se scinde en groupe parfois amis, parfois ennemis. Pourquoi existe t-il des Etats ? Afin de répondre à cette question, nous étudierons premièrement la notion d’Etat et ensuite nous tenterons de déterminer si la pluralité des Etats existe parce que c’est la meilleure alternative ou parce qu’elle n’a pu être évitée.

L’on définit l’Etat, sur un territoire donné, comme un pouvoir légitime - c’est-à-dire élu par les foules ou monarchique…- qui organise la société. Nos sociétés occidentales ont appliqué les théories de Montesquieu dans l’Esprit des lois (1748) pour lequel l’Etat a trois pouvoirs essentiels : les pouvoirs législatif, exécutif, et judiciaire qui tous trois doivent être distincts, équilibrés, et qui ne doivent surtout pas être commandés par le même homme ou la même assemblée.
L’Etat est une institution fondamentale pour toute société civilisée puisqu’elle lui assure paix, justice… Cependant la notion même d’Etat est indéfinissable puisque tous les philosophes, hommes politiques… ne s’accordent pas pour désigner son rôle : leurs théories diffèrent. En effet, si les libéraux s’accordent depuis le XIXème siècle à désigner l’Etat comme un simple organisme visant à préserver la sécurité des habitants et surtout n’intervenant pas dans la vie économique du pays, les partisans du Welfare state par exemple n’ont pas du tout la même définition du rôle de l’Etat.
De plus, la question du régime politique idéal divise les hommes depuis l’Antiquité : faut-il vivre dans une démocratie, une royauté… L’Etat divise donc les hommes dans tous les sens du terme : non seulement les hommes ne s’accordent pas à définir cette notion qui semble évoluer avec l’histoire mais aussi les hommes se divisent en plusieurs Etats. L’humanité ne serait-elle pas capable de surmonter cet écueil ? les hommes seraient-ils comme des fourmis qui vivent certes en société mais dont les différentes sociétés sont incapables de fusionner réellement ?

Dans cette première partie nous avons tenté de définir la notion d’Etat, considérons désormais les Etats. En effet il semble qu’historiquement l’humanité n’aie jamais été unie en un seul Etat et que la vie civilisée ait introduit la pluralité des groupes, et donc des Etats. Si cette pluralité est une réalité existant jusqu’à nos jours, l’on peut s’interroger sur sa cause : est-ce la meilleure alternative ou un moindre mal que l’on pourra plus tard dépasser ?
Plusieurs facteurs semblent indiquer que la pluralité des Etats est la meilleure alternative pour l’humanité, et cela pour toujours. En effet, l’existence de plusieurs Etats permet à différentes philosophies, à différentes idéologies d’être appliquées sur un nombre relativement restreint d’individus avant de l’étendre à l’humanité, et ainsi d’éviter d’appliquer de mauvaises politiques sur la planète. Par exemple, la conception marxiste-léniniste du pouvoir a été appliquée en URSS de 1917 à 1991 et sa vocation était de s’étendre à l’humanité. La désastreuse concrétisation de ces théories a permis à cet universalisme de ne pas trop s’étendre alors que l’universalisme occidental qui a été un succès a pu s’étendre au monde et a permis à des pays -les Dragons asiatiques- de se développer.
De plus, la pluralité des Etats permet de limiter les risques de la représentation politique. En effet, plus le monde est divisé en Etats et plus il existe de représentants politiques. En d’autres termes, plus il y a d’Etats et plus les citoyens ont d’influence, en effet, si le monde d’aujourd’hui était composé d’un seul Etat, alors la voix d’un citoyen serait négligeable en comparaison des six milliards d’individus.
Et même si l’on considère que la présence d’un seul Etat est possible, alors cet Etat serait trop grand, difficile à gérer à cause notamment de mouvements nationalistes inévitables, il faudrait annexer des territoires par l’usage de la force et alors il ne s’agirait plus d’un Etat de droit. En outre, à une telle échelle, les opposant au régime seraient des millions, voire des milliards, ce qui se traduirait par une instabilité du régime permanente. Et enfin, il y aurait l’immense problème de la détermination du chef d’Etat qui deviendrait alors le maître du monde, et même si ce dernier arrivait au pouvoir légitimement, comment ne pas éviter qu’il fasse passer son intérêt propre avant l’intérêt général ? Et par ailleurs, des guerres de chef pour obtenir le pouvoir suprême seraient inévitables, ce qui fragiliserait encore ce régime… De tout cela il apparaît que même s’il était possible qu’un seul Etat puisse exister, alors il serait trop fragile pour perdurer. S’il existe donc des Etats, c’est parce qu’un seul ne pourrait se maintenir.
Et enfin, si l’on considère que les hommes politiques ne dirigent pas leurs pays mais qu’ils les gouvernent, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de finalité de l’humanité, qu’ils ne guident pas les hommes vers un monde meilleur, alors la pluralité des Etats semble effectivement être la meilleure alternative. Si l’on considère en effet que " gouverner, c’est mener la barque " comme l’explique Créon dans Antigone de Jean Anouilh, c’est-à-dire que le chef d’Etat ne recherche pas un absolu mais le moindre mal, alors l’humanité toute entière n’a pas véritablement de destin commun, et le concept d’Etat-nation -c’est-à-dire chaque nation possède son propre Etat- n’est pas alors vide de sens.

Dans cette partie, nous avons étudié les arguments en faveur de la pluralité des Etats, cependant affirmer que la réalisation d’un seul Etat est sinon impossible au moins néfaste est une position individualiste incompatible avec le sentiment d’humanité décrit précédemment. S’il Existe plusieurs Etats, ne serait-ce pas plutôt parce que nous n’en voudrions qu’un seul mais que c’est impossible actuellement ?

L’on ne peut nier qu’actuellement les hommes ne seraient pas tous d’accord pour former un seul Etat par peur de l’établissement d’un régime totalitaire, mais aussi parce que tous ne partagent pas la même culture, la même histoire, la même langue… En d’autres termes parce qu’il n’existe pas encore de nation-humanité. Cependant, malgré toutes les réactions nationalistes, le monde tend à s’uniformiser par le processus de mondialisation, si bien que l’on définit souvent le monde comme étant un " village planétaire ". Par conséquent, si le monde d’aujourd’hui n’est pas assez uni, si les niveaux de développement sont encore trop inégaux actuellement, ne peut-on pas envisager dans l’avenir un Etat-planète ?
De plus, dans la société néo-capitaliste actuelle, l’importance des Etats décroît, et si les grands blocs se morcellent en plusieurs Etats, l’on ne peut nier qu’à l’image de l’Union Européenne les Etats se regroupent. Aussi l’on peut supposer qu’à l’avenir, ces mêmes Etats se regrouperont en un seul. Peut-être alors que les Etats sont une étape nécessaire vers la création d’un seul Etat.
De plus, si l’on considère, contrairement à la première partie, que le chef d’Etat ne gouverne pas, mais dirige, alors la notion de finalité de l’humanité justifie cette volonté de réaliser un unique Etat : l’humanité avance vers le même but, alors son unité est préférable. Par ailleurs, cette unité est possible si l’on considère la nature humaine d’un point de vue religieux. En effet, la Bible précise que : " Dieu a fait l’homme à son image ", ce qui implique entre-autre l’égalité et l’unicité des êtres humains. Cette association possible dans l’avenir de l’humanité semble donc non seulement réalisable, mais aussi très bénéfique puisqu ’elle permettrait d’éviter des guerres, etc …


A travers cette réflexion, il apparaît que s’il existe des Etats, c’est pour créer une humanité, dans toute sa diversité, et peut-être qu’il y aura toujours à l’avenir des Etats, mais alors ceux-ci n’auront plus la même fonction -cette fonction dépendra de la politique choisie : libérale, sociale... - et la notion d’Etat n’aura plus la même signification. Alors le monde s’unifiera peut-être, à l’image de l’Union Européenne, une tentative pleine d’espoir, et alors la question : Pourquoi des Etats ? deviendra Pour quoi des Etats ? Cependant il convient de se demander si un tel projet n’est pas irréalisable, en d’autres termes si ce rêve ne serait pas dû à la volonté de combler l’angoisse métaphysique de l’imperfection de l’être humain par la tentative de faire du groupe une perfection. Peut-être s’agit-il ici du rêve de Bernard Werber : " 1+1=3 " , c’est-à-dire que l’union des forces individuelles crée une force supérieure à la somme arithmétique des forces individuelles, que le groupe permet de combler nos imperfections individuelles.