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La révolution industrielle du 19ème siècle
a mis en place le processus de croissance économique qui orienta la majeure
partie des politiques économiques du 20ème siècle. Parallèlement
à cela, on a assisté à partir de 1920 à la naissance
et au développement de ce qu’on appelle maintenant " la société
de consommation ". Aussi il est légitime de se demander comment intervient
la consommation dans la conjoncture économique. Pour cela nous étudierons
d’abord comment la consommation s’inscrit dans une période de croissance
économique soutenue ; puis nous verrons le lien entre consommation et croissance
dans une période de crise ; enfin nous verrons comment des erreurs d’interprétation
de la consommation peuvent conduire à des retournements de conjoncture
économique.
Etudions comme premier exemple historique de période de croissance économique
la seconde moitié des années 20.A la fin de la première
guerre mondiale, il a fallu procéder à la remise en place d’un
ordre mondial : la fin des reconstructions des économies des pays belligérants
et intervenants est généralement située vers 1925. A partir
de cette date, la demande, qui avait été brimée pendant
le conflit, prend de l’importance et on note donc une augmentation générale
des consommations dans les grands pays industriels. Certains aspects du conflit
n’ont pas encore été réglés mais ils ne gênent
pas la croissance économique : ainsi en France, sous prétexte
que l’Allemagne paierait, les gouvernements n’ont pas eu de recours massif à
la fiscalité pour financer la reconstruction ; de ce fait il n’y a pas
eu de baisse du pouvoir d’achat des consommateurs. De 1925 à 1929, l’augmentation
de la consommation est donc générale et dope la croissance économique
: les opérations financières se multiplient et l’investissement
augmente.
De la même façon, pendant la période dite des " 30
glorieuses ", la hausse quasi-constante de la consommation est le moteur
principal de la croissance : les méthodes tayloristes mises en œuvre
provoquent une hausse de la productivité, et l’augmentation des profits
est transmise aux salariés ; cette hausse des salaires est faite pour
augmenter la consommation des ménages, donc la demande : ce système
révolutionnaire par rapport à la pensée classique est le
fordisme ; en augmentant ainsi la demande on augmente l’offre et le processus
de croissance économique est lancé. Ainsi de 1945 à 1970,
une consommation de masse, de produits standardisés, de biens d’équipement
(tels que la télévision et les biens d’électroménager),
et qui s’étend à la majorité de la population (les classes
moyennes entrant de plein pied dans cette société de consommation
)apparaît là-encore comme le moteur de la croissance économique.
On a donc mis en évidence que la consommation est indissociable de la
croissance économique car la hausse de la demande, qui s’associe à
celle de l’offre entraîne nécessairement une croissance économique.
Intéressons-nous maintenant aux périodes de crise
: celle des années 30, qui débuta par un krach boursier en 1929
avant d’atteindre le système financier, puis le système économique
international tout entier dès 1931 fut d’une ampleur telle que la nécessité
de prendre des mesures pour retrouver une croissance économique s’imposa
rapidement. Les premières mesures prises furent de nature déflationniste
et n’eurent aucun effet sur le cercle vicieux qui s’était mis en place
: en effet en voulant appliquer une politique de rigueur et diminuer les dépenses,
on diminua les salaires donc la consommation ; la mévente entraînait
alors la baisse des prix et la faillite des entreprises. Alors le chômage
augmentait, ce qui contribuait encore à réduire la consommation.
Ce contexte de ralentissement de l’activité économique se révéla
donc défavorable à la reprise.
Suite à ces mesures infructueuses, les Etats-Unis ont appliqué
une politique économique novatrice : le New Deal. Une politique de grands
travaux (concernant notamment la mise en valeur d’une partie Appalaches) permit
de lutter conter le chômage, donc de restituer un certain pouvoir d’achat.
De plus l’organisation de la production agricole (par la diminution des terres
cultivées et donc du risque de surproduction) et industriel (par l’organisation
oligopolistique de certains secteurs) fixa des prix minimums. Cet ensemble de
mesures qui relançait la consommation, tout en la dirigeant afin de stabiliser
le système de production fut un succès pour la reprise de la croissance
économique.
Enfin l’exemple du rationnement mis en place aux Etats-Unis pendant la seconde
guerre qui a permis au pays de s’enrichir et non de subir une inflation montre
bien qu’en période de crise, la consommation doit être contrôlée
et relancée ou rationnée selon l’état du système
de production pour rééquilibrer l’activité économique
et rendre possible une nouvelle croissance économique.
Dans une troisième partie, nous allons étudier le lien entre la
consommation et le passage d’une période de croissance à une période
de crise. Tout d’abord en reprenant l’exemple de la croissance des années
20, on a constaté que la consommation n’y était pas si importante
; en fait l’euphorie de ces " années folles " à la fin
du premier conflit mondial a fait croire à une forte croissance économique
or cette croissance, bien que notable fut exagérée : il y eut
alors spéculation sur le cours des actions et création d’un décalage
entre valeur réelle du capital et valeur cotée en bourse. Ce décalage,
au moment où il a fallu le régler, se transforma en facteur déclencheur
de la crise.
Ensuite l’analyse des relations entre croissance économique et consommation
pendant les 30 glorieuses fait apparaître une interaction par l’intermédiaire
de l’inflation : son effet euphorisant faisait croire à une augmentation
réelle de la valeur des salaires et faisait augmenter la consommation,
alors qu’en fait il existait une spirale inflationniste structurelle. En effet
les salaires et la demande augmentant, on augmentait la production et avec,
les prix donc les revenus des agents de production soit les salariés.
Ainsi au cours des 30 glorieuses le système fordiste qui dopait la consommation
pour pousser la croissance s’est altéré.
Parallèlement à cela, on peut reprendre des éléments
de l’analyse des crises du système capitaliste par Keynes : il a mis
en évidence deux failles du système libéral. D’une part
les entrepreneurs anticipent sur la demande et produisent en fonction d’une
consommation imaginaire ; d’autre part l’épargne des consommateurs n’est
pas prise en compte alors qu’elle implique une consommation inférieure
aux revenus. Keynes, en montrant que la régulation de l’offre et de la
demande n’est pas automatique et qu’elle peut perturber la croissance économique,
propose d’intervenir sur la consommation en augmentant le pouvoir d’achat par
l’acceptation d’un déficit budgétaire de l’Etat.
On a ainsi montré que si la consommation est indiscutablement un moteur
pour la croissance économique, elle doit être organisée
et réglementée en période de crise pour que la croissance
reprenne. En fait, non seulement la consommation intervient aussi dans les périodes
de récession économique mais elle peut même devenir un facteur
de retournement de conjoncture en masquant ses déséquilibres face
au système productif.