Depuis 1945, l’État-Providence est associé aux interventions systématiques de l’État dans l’économie. Naturellement, ce dernier ne naît pas, de toutes pièces, de la réflexion d’un esprit brillant, mais résulte d’une lente évolution dont les débuts s’associent à la mise en place de l’économie de marché. Il faut quand même préciser la formule habituelle. Dans son usage contemporain, elle a au moins deux significations :
• D’abord un sens strict. Avec Lord Beveridge (1942 et 1944), et bien qu’il ne soit pas lui-même à l’origine de la formule, l’État-Providence correspond à la socialisation de certains risques collectifs : vieillesse, maladie, accidents du travail, etc., et par extension le chômage. Dans ces termes, on évoque aujourd’hui une “crise de l’État-Providence”. La progression des dépenses sociales va de pair avec une croissance qui s’est accélérée tout au long des “Trente Glorieuses” (J.Fourastié). Par contre, avec les “Trente Piteuses” (N.Baverez), on assisterait au rendement social décroissant d’une institution, l’État-Providence, maintenant en déclin. C’est la thèse de la Nouvelle Histoire Économique ; en l’occurrence D. North (prix Nobel 1993). On y reviendra.
• Mais il y a aussi un sens large qui, finalement, associe à la socialisation de risques collectifs, des pratiques spécifiques de politique économique ; qu’elles soient conjoncturelles (budgétaire et monétaire) et / ou structurelles (planification, formes de la concurrence, politiques de l’emploi, politiques de re-venus, politiques sociales, etc.). Bref, dans cette seconde acception, l’État-Providence correspond à toute l’intervention étatique dans l’économie de marché. On oppose alors des keynésiens” (dans le sens le plus répandu de l’adjectif), partisans de l’élargissement du champ d’action de l’État, et des “libéraux” pour qui la recherche d’un “État modeste” (M. Crozier) serait l’objectif systématique.